Le procureur de la République de Marseille s’inquiète à double titre: tout d’abord, il s’alarme d’une «ubérisation» du trafic d’armes. De plus, le profil des trafiquants est nouveau: il s’agit de «libertariens» qui s’inscrivent dans «la mouvance pro-armes étasunienne». Le colonel Hervé Pétry, chef de l’unité nationale «cyber», expliquera que leur but est de «diffuser des armes au plus grand nombre de personnes pour se protéger de l’État qu’ils considèrent comme totalitaire et oppresseur».
Un vaste coup de filet dans plusieurs régions de France et en Belgique
Nicolas Bessone, procureur à Marseille, expliquera en conférence de presse mardi 6 février qu’«il s’agit d’une première en France» qui «ne manque pas de nous inquiéter». L’enquête a été pilotée par la division «cyber» de la gendarmerie nationale. Il aura fallu un an d’enquête et l’infiltration de groupes de discussions sur la messagerie Telegram pour parvenir à des arrestations fin janvier dans les régions Provence-Alpes-Côte d’Azur, Île-de-France, Grand-Est, Midi-Pyrénées et en Belgique.
Les effectifs nécessaires à cette opération sont impressionnant. Il aura fallu 300 gendarmes, dont le GIGN, pour mener à bien l’interpellation de quatorze personnes. Les enquêteurs ont aussi récupérer huit imprimantes 3D, sept armes 3D complètes ainsi que vingt-quatre armes conventionnelles. Le réseau était dirigé par un jeune homme de 26 ans, connu de la justice pour trafic de stupéfiants et habitant le Var. Le colonel Pétry indiquera que le suspect est très proche des mouvances «libertariennes» américaines.
150€ pour fabriquer un fusil mitrailleur avec des munitions de 9mm
Le procureur va relever «la bonne qualité des armes fabriquées par ce procédé». Parmi elles, les gendarmes ont saisi des FGC-9 qui correspondent aux fusils mitrailleurs tirant des cartouches traditionnelles de 9mm. Ces armes peuvent être fabriquées au domicile d’un des mis en cause grâce à une imprimante 3D achetée 150€. Le manuel de fabrication de trouve très facilement sur le «darkweb». Le colonel Pétry a précisé que ces armes «de bonne voire très bonne» qualité, dépourvues de marquage et donc non traçables, sont «proches à 95% du modèle d’origine». Selon Rajan Basra, chercheur au King’s College de Londres, «la plupart des utilisateurs de ce type d’armes sont des collectionneurs motivés ou des «idéologues», «survivalistes» ou désireux de rivaliser avec les autorités.