De nombreux mythes entourent le village olympique. Le lieu réservé aux délégations et fermé au public attise toutes les curiosités.
Sexe, sport et rock’n’roll
Rappelons que 200 000 préservatifs, 10 000 préservatifs sans latex et 20 000 digues buccales ont été mis à la disposition des athlètes et de leur délégation. C’est bien plus qu’à Tokyo, mais beaucoup moins qu’à Rio.
De nombreux sportifs alimentent l’imaginaire de fête sans fin qui entoure les villages olympiques, à l’instar de ce que racontait Hope Solo, la gardienne de l’équipe de football américaine lors des jeux de Londres en 2012 : « Dans ce type d’événements qui ne vous arrive qu’une seule fois dans votre vie, vous voulez vous créer des souvenirs, aussi bien sexuels, festifs ou sportifs. »
Pareillement, Brahim Asloum, champion olympique de boxe à Sydney en 2000 explique la logique de ces comportements : « Au village, tu as 10.000 mômes qui ont travaillé comme des chiens pour en arriver là. Médaille ou pas, ils veulent savourer ce moment et relâcher toute la pression accumulée. C’est le culte du corps et le règne du physique de dieux et de déesses et les athlètes ont conscience de former une élite de leur génération, alors forcément, ça se rapproche beaucoup […] Tu croises aussi des garçons et des filles qui ne sont jamais sortis de chez eux, qui ont laissé leurs parents à l’autre bout de la planète. Il y a un lâcher-prise évident et beaucoup moins de chichis pour les rencontres qu’en temps normal. Tout le monde se parle, tout le monde est heureux d’échanger avec d’autres nations, que tu sois une star ou un inconnu. C’est normal au Village olympique, pas dans la vraie vie. »
Il n’y a pas seulement la fête et le sexe, il y a aussi des scènes violentes, témoignant des grandes quantités d’alcools consommées : on peut se rappeler de Pékin en 2008 qui avait vu un tennisman français prendre un coup au visage car il avait un peu trop flirté avec la copine d’un autre joueur.
Une fête qui peut couter des médailles
En effet, la fête peut réduire les performances des sportifs : il doit être difficile de gagner une médaille en gueule de bois ! D’ailleurs, Alain Bernard, champion olympique du 50 mètres nage libre à Pékin le dit : « Je me souviens qu’en 2008 à Pékin, mon entraîneur m’avait un peu rappelé à l’ordre à l’issue de la première journée. Mais je connais des athlètes qui étaient très bons, qui avaient le potentiel pour être champions olympiques et qui n’ont jamais rien fait car ils se sont perdus en rentrant au Village olympique. Ils n’étaient plus là pour performer, juste pour vivre les Jeux ».
Si certains peuvent se perdre dans l’ambiance, Renaud Lavillenie se rappelle qu’il faut savoir garder la tête froide et se concentrer sur la compétition « À Londres, ma finale était l’avant-dernier jour des Jeux, et il était hors de question que je sorte de ma bulle avant. Et ce, malgré les tentations, car à ce moment-là, je peux vous dire que je voyais des sportifs qui rentraient de soirée et tout. Mais si tu sais pourquoi tu es là… »
Asloum conclut « Une histoire de cul ne vaudra jamais une médaille d’or ».
Les risques multipliés à cause des applications
Le règne des applications de rencontre est avéré : pendant les JO d’hiver de Pyeongchang (Corée du Sud) en 2018 l’utilisation de Tinder avait augmenté de 350%.
C’est pourquoi, Grindr – le Tinder de la communauté LGBTQ+ – a décidé de protéger les athlètes en désactivant la géolocalisation car « L’utilisation peut exposer au risque d’être démasqué par des personnes curieuses qui pourraient essayer de l’identifier sur l’application ».
De nouvelles générations plus sages
Jerôme Fernandez, qui a connu quatre villages, voit une évolution des comportements. « Dans le bâtiment de l’équipe de France, il règne une ambiance super conviviale. L’immense majorité des athlètes savent qu’ils n’ont aucune chance de décrocher une médaille mais veulent vivre pleinement cette expérience. Malgré tout, personne n’ose déranger ceux qui se préparent pour aller chercher un titre. Dans les chambres, ce n’est pas la nouba toutes les nuits, même si beaucoup de couples se forment » avant d’ajouter « Notre génération était déjà beaucoup plus calme que la précédente et les jeunes aujourd’hui le sont encore plus, ça n’a rien à voir », assure-t-il.
Cet assagissement serait du aux nouvelles organisations des JO : les athlètes et leur délégation restent moins longtemps au village et ils sont plus entourés, surtout les plus jeunes.
Jerôme Fernandez pointe aussi la menace des réseaux sociaux : « Il n’y avait pas tout ça à notre époque. Je ne recommencerais pas ce que j’ai fait aujourd’hui en prenant le risque de me retrouver en photo dans un drôle d’état et accompagné ».