Pour rappel, le 2 mars 2022, le militant indépendantiste corse Yvan Colonna, qui purgeait une peine de prison à perpétuité à la prison d’Arles pour l’assassinat du préfet Claude Erignac qu’il a toujours nié avoir commis, avait été violemment agressé dans la salle de sport par Franck Elong Abé. Cet homme de 36 ans purgeait plusieurs peines, dont une de neuf ans, pour «association de malfaiteurs en vue de la préparation d’un acte de terrorisme».
Comment des détenus aussi dangereux peuvent-ils jouir d’une détention ordinaire?
Le groupe parlementaire LIOT, Libertés, indépendants, outre-mer et territoires, a exercé son droit de tirage pour lancer cette commission d’enquête, en soumettant une résolution du député de Haute-Corse Jean-Félix Acquaviva. Celle-ci entend faire la lumière sur «les conditions dans lesquelles» le meurtrier présumé «a pu bénéficier d’un classement en détention ordinaire (…) et ne pas être soumis aux étapes de détection de la radicalisation en milieu carcéral». La commission souhaite également «étudier la genèse et les conditions dans lesquelles le statut de détenu particulièrement signalé a été maintenu» pour Yvan Colonna. Celui-ci était jugé comme un prisonnier exemplaire par la direction de la prison.
Le député Acquaviva explique que «ce qui est en jeu, c’est la soif de justice et de vérité de la société insulaire». Il a estimé que des auditions à l’Assemblée avaient révélé des «contradictions», en particulier sur «l’évaluation de la radicalisation» du meurtrier présumé. Le groupe LIOT espère commencer les travaux «en décembre ou janvier, pas plus tard». Cette commission, qui sera composée de trente députés tout au plus suivant une représentation proportionnelle des groupes à l’Assemblée, rendra ses travaux dans un délai maximum de six mois.
Le peuple corse est encore traumatisé par ce meurtre
Caroline Abadie (Renaissance), rapporteure du texte créant la commission, a indiqué que «la commission devra veiller tout au long de ses travaux à ne pas faire porter ses investigations sur des questions relevant de la compétence exclusive de l’autorité judiciaire». Gilles Simeoni, président du conseil exécutif de Corse, quant à lui, dira espérer «qu’elle permettra d’avancer de façon significative vers l’exigence de vérité et de justice». La présidente de l’Assemblée de Corse, Marie-Antoinette Maupertuis, a indiqué: «nous attendons désormais que toute la lumière soit faite sur les circonstances de cet assassinat».
La Première ministre avait déclaré en juillet que l’ex-directrice de la prison d’Arles et un surveillant vont faire l’objet de «procédures disciplinaires». De plus, un rapport de l’inspection générale de la justice a estimé que le surveillant chargé de l’aile où se trouvait l’indépendantiste corse a fait preuve d’un «net défaut de vigilance» en restant «sans aucun motif éloigné» du lieu des faits, qui ont duré neuf minutes.