L’acquittement de Bernard Pallot, qui a mis fin aux souffrances de son épouse Suzanne, témoigne de l’insuffisance de la législation française actuelle sur la fin de vie. Pallot, 78 ans, avait étranglé sa femme, qui souffrait de pathologies graves et dont la vie, selon lui, « n’était plus supportable ». Il explique avoir agi « par amour » et « à sa demande » pour qu’elle « ne souffre plus ». Le verdict d’acquittement montre une reconnaissance de cette réalité humaine douloureuse tout en exposant les limites de la loi actuelle.
Un acquittement révélateur des limites de la loi
Le 11 octobre 2021, Bernard Pallot tente de mettre fin aux souffrances de sa femme en lui injectant du cyanure dans la cuisse, mais échoue. Dans un acte qu’il qualifie d’« improvisé », il décide alors d’utiliser un morceau de fil électrique trouvé dans leur garage pour la stranguler. Pallot a déclaré lors de l’enquête : « Ça paraît un peu sauvage comme méthode, mais je n’avais pas le choix. » L’évidence de son acte est manifeste lorsqu’il confesse spontanément aux gendarmes, à leur arrivée : « C’est moi qui ai tué ma femme. Elle est là, je l’ai étranglée. »
Malgré cette confession, il a affirmé tout au long du procès avoir agi uniquement par amour et pour tenir une promesse faite à Suzanne, celle de la soulager de souffrances qu’elle ne pouvait plus endurer. Des recherches sur l’euthanasie et le suicide au cyanure, retrouvées sur l’ordinateur du couple, montrent la réflexion sérieuse du septuagénaire et sa tentative de trouver une alternative à cette fin tragique. À un ami, Pallot aurait d’ailleurs confié : « En France on ne peut pas euthanasier les gens qui souffrent, mais on le fait pour les animaux. »
Le procès de Bernard Pallot, 78 ans, s’est tenu du 28 au 30 octobre à la cour d’assises de l’Aube. Cet ancien professeur en IUT, au casier judiciaire vierge, a été jugé pour l’assassinat de son épouse Suzanne, qu’il a étranglée après une tentative d’euthanasie infructueuse. Bernard Pallot a expliqué avoir agi pour « qu’elle ne souffre plus », en réponse aux souffrances intolérables de son épouse, atteinte de plusieurs pathologies chroniques et de multiples fractures dues à l’ostéoporose, notamment une fracture du col du fémur survenue peu avant les faits.
L’urgence d’un cadre légal pour accompagner la fin de vie
Ce procès souligne l’urgence de réformer la loi afin de donner un cadre légal à l’euthanasie, pour éviter des situations où des personnes en souffrance demandent à leurs proches de les soulager, sans qu’ils aient de solution légale. Comme l’a souligné Pallot lui-même : « Ce procès témoigne de l’insuffisance de la loi qui nous met dans des situations, nous les particuliers, difficiles, et même la justice puisqu’ils ne savent pas comment composer avec la loi actuelle ».
Pendant les réquisitions, l’avocat général, Mickaël Le Nouy, a rappelé que « cet assassinat, présenté comme un geste d’amour, est un geste interdit par la loi », insistant sur l’interdiction de « s’arroger le droit de tuer ». Il a décrit une « mort sauvage » et « brutale », et a requis huit ans de prison, soulignant que « l’argument de l’euthanasie est inopérant en droit pénal ». Cependant, il a également noté que « le retour en prison n’était pas adapté » pour un homme de 78 ans avec un casier vierge, manifestement en détresse morale.
La défense, assurée par l’avocat Frédéric Verra, a plaidé que la situation désespérée de Suzanne Pallot aurait pu être résolue différemment si une loi sur l’euthanasie avait été en place. Selon lui, « si l’euthanasie était légale, Bernard Pallot n’aurait pas étranglé sa femme avec un fil électrique », ajoutant que cette improvisation tragique reflétait l’isolement dans lequel le couple se trouvait face aux douleurs insoutenables de Suzanne. Verra a d’ailleurs tenté de faire témoigner Olivier Falorni, rapporteur du projet de loi sur la fin de vie, mais celui-ci a décliné pour éviter d’influencer la décision de la cour.
Les mots de Suzanne Pallot, un appel à la dignité en fin de vie
La déclaration de Suzanne Pallot, laissée par écrit avant sa mort, vient renforcer cette idée. Elle y affirmait être « encore saine d’esprit » et demandait à son mari « de [la] soulager définitivement des souffrances incurables que [je] supporte ». Ce mot prouve sa volonté et renforce la nécessité d’une loi qui permettrait de répondre à de telles demandes dans un cadre légal et sécurisé, sans que des proches soient poussés à des actes désespérés. En définitive, l’acquittement de Bernard Pallot appelle à une réforme rapide de la législation sur la fin de vie, permettant à chacun de bénéficier d’un accompagnement digne et légal dans les cas de souffrances incurables